Théâtre
Les Corps incorruptibles
Aurélia Lüscher
La pratique théâtrale d’Aurélia Lüscher se nourrit d’investigations de terrain en portant un regard facétieux sur le monde. Elle a ainsi effectué un stage dans une entreprise de pompes funèbres pour mieux comprendre le sort réservé aux dépouilles mortelles. A défaut de pouvoir appréhender le mystère de la mort, le spectacle qui en résulte mêle avec humour théâtre et arts plastiques, réalité et fiction, être et néant, défunts et vivants.
Lors d’une enquête au long cours, à la fois intime et de terrain, l’artiste a voulu comprendre comment on s’occupe aujourd’hui de nos morts, à l’abri des regards. Elle invite le public à entrer dans ces lieux clos que sont les sous-sols des chambres mortuaires, pour appréhender la gestion des dépouilles mortelles en Occident. Elle construit à vue une autofiction, en naviguant entre différents codes de jeux et diverses adresses.Le titre les corps incorruptibles fait écho à un phénomène reconnu comme « miracle » par l’Église catholique, à savoir la non-putréfaction des cadavres : la façon dont ils sont conservés leur garantit un état permanent de semi-décomposition, sans la moindre odeur.
Biographie
Aurélia Lüscher se forme au Conservatoire de Genève en Suisse, puis de 2012 à 2015 à l’École de la Comédie de Saint-Étienne.
Avec la compagnie le désordre des choses qu’elle co-fonde en 2014 avec l’auteur Guillaume Cayet, iels créer des spectacles autour de thématiques récurrentes : la montée des fascismes, les normes agricoles, la fracture coloniale, les violences policières, les systèmes de dominations. Ils créent à la fois des grandes formes pour salle de spectacle et des formes itinérantes, ayant vocation à aller à la rencontre d’autres publics. Au sein de la compagnie elle met en scène des textes de Guillaume ou les siens et/ou joue et participe à la conception des projets.
En 2017 elle fonde également le Collectif Marthe implanté à Saint-Étienne, avec Marie-Ange Gagnaux, Clara Bonnet et Itto Medhaoui. Elles écrivent, jouent, mettent en scène et construisent leurs décors de manière collective. Toujours sous un prisme de lecture féministe, elles s’emparent de livres théoriques ou oeuvres non théâtrales, afin de les transformer au plateau. Elles ont travaillé sur « Caliban et la sorcière » de Silvia Federici, « Se défendre une philosophie de la violence » de Elsa Dorlin et l’oeuvre cinématographique de la réalisatrice suisse Carole Roussopoulos avec « Rembobiner » créé en mai 2022.
A côté de son travail théâtral, elle se forme à la céramique et développe sa pratique en arts plastiques.
Note d’intention
Aujourd’hui, le statut du cadavre est flou, oscillant entre personne et objet, rendant les notions de droit incertaines. Le monde du funéraire nous paraît opaque, dominé par des pratiques institutionnelles et des intérêts économiques. Ce spectacle souhaite interroger ces questions et remettre en question nos choix actuels face à la mort. Comment souhaitons-nous traiter les corps de ceux que nous avons aimés ? À qui confions-nous cette responsabilité et quelles sont les lois qui encadrent ces décisions ? Pourquoi la thanatopraxie, souvent proposée comme une première option, est-elle devenue incontournable en Occident ? Pourquoi des rites anciens, tels que les masques funéraires, ont-ils disparu ? Peut-on envisager des alternatives, comme la transformation des corps en compost ?
Le spectacle cherche à explorer ces zones d’ombre. En guise de décor, j’imagine un espace transitoire, réaliste au début : un sous-sol, froid et aseptisé, où les corps attendent, comme dans une faille temporelle. Progressivement, ce décor se déconstruira, se décomposera, laissant place à l’organique, pour symboliser la transition et le passage du corps de l’état médical à une forme plus naturelle et personnelle.
Ce travail scénique, fondé sur une dramaturgie qui mêle fiction et réalité, historique et intime, proposera une réflexion collective. Plutôt que de chercher à résoudre le mystère de la mort, je souhaite ré-enchanter nos pratiques funéraires, comme le suggère Alexa Hagerty avec les funérailles à domicile. Ces rituels nous reconnectent à nos morts, en investissant le défunt d’une subjectivité persistante, un « mort enchanté », au cœur d’une temporalité étendue. Ce spectacle sera ainsi l’occasion de reconsidérer notre rapport à la mort, en ouvrant la voie à des pratiques alternatives, plus humaines et plus conscientes.
Distribution & mentions
Conception, jeu, écriture Aurélia Lüscher
Collaboration artistique, dramaturgie Mélissa Zehner, Céline Nidegger
Soutien à la dramaturgie Guillaume Cayet
Participation Nadia Skrobeck-Lüscher et Ponyo
Collaboration scénographie et corps Arnaud Louski-Pane et Aurélia Lüscher
Contruction Manon Clavreul Baudry, Ninon Larroque, Arnaud Louski-Pane, Aurélia Lüscher, Pol-Ewen Maisonneuve
Création son Antoine Briot
Régie son Mateo Provost
Création lumières Juliette Romens
Régie générale et régie plateau Xulia Rey Ramos
Assistanat Manon Clavreul Baudry
Conseils plastiques et céramique Aline Morvan
Administration Roma Calmant
Diffusion – production Karine Bellanger / bora bora productions
Remerciements Agnès Mathieu-Daudé, Magali Molinié, Jean-Pierre Sueur, Nicolas Delestre, Pierre Madelin, Léa Good, Lili Illy, Jennifer Gold, Philippe Lüscher, Maison Mazette!, Florian Laze, Sandy, Pierre, la scierie Girard et les travailleur.euses du funéraire rencontré.es au cours de cette enquête.
Production cie Le désordre des choses
Avec le soutien de la Fondation d’entreprise Hermès
Avec le soutien du Fonds de dotation Porosus
Coproductions Studio-Théâtre de Vitry ; La Comédie de Clermont-Ferrand – scène nationale ; Les Subs – lieu vivant d’expériences artistiques – Lyon ; Le Dôme Théâtre d’Albertville
Le projet est 1er lauréat du dispositif de production et de diffusion le Réel Enjeu 2022
Accueil en résidence Fondation J. Aubert Tournier – Maisons Mainou – résidence d’auteurice – Suisse ; Le Théâtre du Point du Jour, Lyon ; La Chartreuse – centre national des écritures du spectacle, Villeneuve Lez Avignon.
Le désordre des choses est une compagnie conventionnée avec la Drac Auvergne – Rhône-Alpes. Elle reçoit le soutien de la région Auvergne-Rhône-Alpes et du département du Puy-de-Dôme.