Performance
Arts visuels
Skinless
Théo Mercier
D’un paysage de détritus, amas de cartons et canettes compressés, émerge une parade amoureuse sombre et sensuelle. Dans ce jardin d’Eden inversé, des Adam et Eve au masculin se dévorent, se dissolvent et s’incorporent. Avec un lyrisme troublant, Théo Mercier compose un hymne à l’amour et à la métamorphose pour tenter de recycler au mieux les sentiments déchus.
Chaque jour, des anonymes créent des souvenirs dans les villes, avant que l’amour et le désir ne deviennent des déchets du passé. Skinless, le nouveau spectacle de Théo Mercier, explore cette dualité à travers une arène de déchets compressés, où trois personnages masculins évoluent sous l’œil des spectateurs. Cette dystopie met en scène un couple à trois têtes dans les ruines du capitalisme. Deux personnages en latex évoluent entre surface et souterrain, tandis qu’un troisième, métallique, erre comme une caméra de surveillance. Mercier livre un hymne à l’amour, la métamorphose, et la lutte contre les systèmes de contrôle.
Biographie
Théo Mercier, né à Paris en 1984, est un sculpteur et metteur en scène français, vivant entre Paris et Marseille. Il déconstruit les mécanismes de l’histoire, des objets et des représentations, croisant anthropologie, géopolitique et paysage. Pensionnaire de la Villa Médicis en 2013 et nominé pour le prix Marcel-Duchamp en 2014, il a remporté le Lion d’Argent à la Biennale de Venise en 2019 et le Prix du Jury de la Quadriennale de Prague en 2023. Son œuvre a été exposée dans des lieux comme la Villa Médicis, le Centre Pompidou, et la Biennale de Cuba. Aussi metteur en scène, ses performances ont été présentées à Nanterre-Amandiers, au Festival d’Avignon et Vidy-Lausanne. Représenté par la galerie mor charpentier, il est associé au Théâtre National de Bretagne. Sa structure, Gᴖᴗdworld, est un espace d’expérimentation artistique éco-responsable, en dialogue avec les enjeux contemporains.
Note d’intention
Chaque jour, derrière les murs des villes, des personnes sans visage s’aiment et construisent méticuleusement un continent de souvenirs. Quand la fin arrive, l’amour et le désir se jettent comme les emballages d’un produit consommé. Que reste-t-il de ces sentiments déchus, ces ordures parmi les ordures qui gisent silencieusement sur les trottoirs du présent, ou dans la poubelle du passé ? Comme une plongée dans l’épaisseur de l’érotisme et du sale, Skinless, le nouveau spectacle de Théo Mercier, est un vaste dispositif quadri-frontal fait de déchets compressés, dans lequel trois personnages masculins évoluent sous l’œil observateur des spectateurs debout. Cette utopie dystopique met en scène un couple à trois têtes qui habiterait les ruines du capitalisme…
Quand les lumières artificielles s’allument sur ce continent de la fin du monde, le public se trouve cerné par deux hautes murailles de déchets métalliques et découvre au centre de l’espace une arène faite de papiers abîmés. Ici, deux personnages pseudo-masculins recouverts d’une seconde-peau en latex, évoluent entre la surface et les profondeurs d’un monde souterrain auquel nous n’avons pas accès. Alors qu’ils ne font qu’un avec l’environnement dont ils sont les agents transformateurs, un troisième personnage métallique évolue, lui, en solitaire dans les couloirs périphériques du monde d’en haut. Inlassablement, ce dernier va et vient à la manière d’un ange mécanique ou d’une caméra de surveillance assoiffée d’amour. C’est en fait à travers les yeux de ce personnage tragique que le drame de cette relation d’amour nous engloutit. Au fil de la pièce, le couple de pseudo-garçons n’aura de cesse de muer et de muter entre l’expression et la répression du désir. S’ils digèrent le cadavre du monde, ils sont aussi l’essence de la vie : tout comme le lit de détritus sur lequel ils reposent, ils ne sont autres que les déchets du passé et les futurs restes d’eux-mêmes. Comme dans une parade amoureuse, ces Adam et Eve au masculin se métamorphosent, se dévorent, se dissolvent, se mélangent, s’incorporent et s’approprient tout ce qui leur reste sous nos yeux. Ensemble, ils recyclent leur relation à l’infini et inventent un langage érotique aussi vulnérable que viscéral. Leur langue inconnue de tous, aurait probablement la couleur de la chair et l’odeur d’une décharge à cœur ouvert.
C’est ainsi qu’au cœur de ce jardin d’Eden inversé, Skinless nous raconte la genèse dégénérée d’une histoire d’amour aussi infertile que transgressive. Car si les détritus sont le terreau unique de cet éco-système à deux niveaux, une répartition des rôles semble pourtant se dessiner très nettement. Tel un démiurge de la tragédie sociale, l’architecte invisible de ce monde désenchanté semble régir les dynamiques de relation et de pouvoir de ce trio avec une main de fer. Face à cet empire de la norme, Skinless rejoue en fait les codes de la Genèse dans une version déviante. Le déchet tout comme l’homo-érotisme y apparaissent comme des
endroits de contestation et des mises en désordre du monde. Car si les corps infertiles sont perçus comme quelque chose qui déséquilibre le monde « normal », les modes de relation que Théo Mercier tente d’inventer à partir des ruines sont avant tout des formes d’amour inspirantes pour la vie elle-même. Dans un lyrisme à la fois sombre et hypertrophique, il met en scène un paysage et une performance qui délivrent au public un décryptage émotionnel de la société de consommation, une lutte contre les systèmes de contrôle et surtout, un hymne à l’amour et à la métamorphose.
Entièrement créé à partir de déchets triés et sourcés localement, Skinless est aussi le fruit d’un partenariat en nature avec le géant français du tri PAPREC, qui fournit la matière de ce spectacle sur l’ensemble de sa tournée en France et en Europe. Fort de ses expérimentations autour du sable et de l’écologie d’emprunt, Théo Mercier développe une réflexion sur les modes de production éco-responsables.
Distribution & mentions
Conception & mise en scène : Théo Mercier
Scénographie : Théo Mercier, Florent Jacob et François Boulet
Collaboration artistique et dramaturgique : Florent Jacob
Collaboration artistique et chorégraphique : Anna Chirescu
Interprété et créé en collaboration avec : Bruno Senune, Maxime Thébault & Aurélien Vieillard
Composition sonore : Pierre Desprats
Création lumière : Florent Jacob, Théo Mercier et François Boulet
Costumes : Théo Mercier et Colombe Lauriot Prevost
Costumes en latex : Arthur Avellano
Accessoires : Etienne Marc
Régie générale : François Boulet et Sara Ruiz Marmolejo
Avec la collaboration de l’équipe technique du TNB : Youna Boutmin, Damien Caris, Stéphane Colin, Yohann Gabillard, Mathieu Hameau, Pierre-Yves Jamaux, Cédric Miclet, Myriam Rault, Léo Serrais, Tugdual Trémel
Production, diffusion : Alma Office – Alix Sarrade
Administration : Charlotte Cancé
Production : Good World
Avec le soutien de la Fondation d’entreprise Hermès
Coproduction : Théâtre national de Bretagne – Rennes, Le Quartz, Scène nationale de Brest, Cndc – Angers dans le cadre des Accueil Studio, La Villette – Paris, Le Volcan, Scène nationale en partenariat avec le Portique, centre régional d’art contemporain du Havre, Maison de la Culture d’Amiens – Pôle européen de création et de production, Festival d’Automne à Paris, CCN – Ballet National de Marseille dans le cadre de l’accueil studio / Ministère de la Culture.
Avec la collaboration de Paprec
Skinless bénéficie de l’aide à la production ministère de la Culture – DRAC de Bretagne.
Avec le soutien de Montévidéo, Centre d’Art et de la Ménagerie de Verre, Paris Mise à disposition de studio au CND Centre national de la danse
Remerciements à Benoit Mazé, Jean-Philippe Dufeu et Lucas Van Poucke. Théo Mercier est artiste associé au Théâtre National de Bretagne, Rennes Photos Skinless : Erwan Fichou – Portrait : Jérôme Lobato